République Française, décembre 2015 : Voilà le peuple français soumit à l’état d’urgence au lendemain d’effroyables attentats. La tentation sécuritaire saisit la nation. Cette tentation, on peut la comprendre. Il est impératif de la juguler. Elle est mauvaise conseillère. L’état d’urgence décrété par le gouvernement et prolongé par les représentants du peuple, par la voie démocratique, c’est tout à la fois la meilleure des choses et c’est terrifiant. Trois mois d’état d’urgence, n’est-ce pas 90 jours de remise en cause de l’État de droit ? Et pourra-t’on le lever, cet état, dans trois mois ? Jusqu’à quel point ne fait-on pas le jeu de Daech ? N’affaiblissons-nous pas la démocratie française ? Tout se passe comme si l’État français se radicalisait. Si cette hypothèse est juste, alors n’assiste t’on pas à une radicalisation rampante de notre république pacifique et universaliste ? Cette radicalisation n’accentue-t’elle pas la polarisation sociale ?

France, pays de la liberté

Les terroristes parasitent les populations vulnérables. Pensez à Saint-Denis, pensez à Molenbeek. C’est la fragilité sociale et économique qui fait de certains quartiers populaires en perdition l’humus des militants de la terreur. Le terrorisme pousse tout droit sur le fumier de la misère du monde. Cela dit, répondre aux effroyables atteintes à la cohésion sociale, à la vie humaine, par la réduction de l’espace démocratique des citoyens, est-ce une entreprise durable ? N’est-ce pas une réduction de la pensée démocratique ? Sous la république de 1793, un panneau planté sur le pont du Rhin portait la fière inscription : « Ici commence le pays de la liberté ». Liberté : quelle beau concept propre à la France ! Voudrait-t’on que notre République prenne le risque que l’on s’y exclame un jour : « Ici commence le pays de la remise en cause de la liberté ? » Ah !, Certes non !

Démocratie vivante

Ce qu’il faut, à mon sens, c’est approfondir la démocratie vivante : il y a les mesures à long terme, il y a les mesures à moyen terme. Le long terme, c’est la justice distributive mondiale, nationale et locale. Rétablir les équilibres mondiaux, le monde n’y passera pas outre sans périr. Il est impérieux d’accepter des règles équitables du jeu commercial, monétaire et financier international. Il importe d’accueillir sans frontière illégitime les réfugiés en concordance avec les droits de l’Homme et les traités internationaux. La France se doit de restaurer son tissu social meurtri dans nos banlieues. À moyen terme, c’est ouvrir bien davantage l’espace de cette participation démocratique tellement vivante dans notre hexagone : par exemple avec un plan national de soutien aux organisations de la société civile oeuvrant à la cohésion sociale et à la participation démocratique. Avec la refondation d’une politique de la ville et du travail social dans nos quartiers “sensibles”. Avec la réintroduction de notre police de proximité. C’est aussi agir contre la discrimination avec une politique d’action affirmative dans le domaine du travail, favorable à nos jeunes issus de l’immigration. À court terme ? La désescalade, le retour à l’état normal de notre démocratie. Que l’on puisse à nouveau manifester sur le climat, pour le droit au travail ou contre la violence faite aux femmes.

Armée du peuple contre la terreur

Et puisqu’il y a une question durable dans les quartiers sécuritaires, je propose ce qui est, selon moi, la meilleure des armes pour la juguler : l’armée du peuple. Rétablissons la conscription suspendue en 1997. Modernisons le service militaire obligatoire en l’ouvrant à tous les sexes, en y introduisant le droit d’association et celui de libre expression, à l’exemple de l’armée néerlandaise. Ouvrons l’armée française à l’interculturel. Et mettons au service des gens, dans nos quartiers sensibles, cette nouvelle armée, du peuple, pour le peuple. Et voila la tentation sécuritaire jugulée, par le peuple.

Brieuc-Yves (Mellouki) CADAT
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